06/11/2024
Le président de Michelin promet de ne laisser "personne au bord du chemin"
Par AFP
(AFP) - Le groupe Michelin a annoncé mardi la fermeture de deux usines en France employant 1.254 salariés en raison de la "dégradation de la compétitivité de l'Europe" et de l'"effondrement" de leurs activités, a déclaré à l'AFP son président Florent Menegaux.
Le patron du fabricant de pneus, dont le siège social est à Clermont-Ferrand, promet toutefois de ne laisser "personne au bord du chemin".
AFP: Pourquoi cette décision ?
Florent Menegaux : "C'est une décision qui est toujours extrêmement difficile à prendre, qui est la plus difficile que j'ai jamais eu à prendre dans mes fonctions. C'est une décision qu'on prend toujours en dernier recours.
Les circonstances du marché européen du pneumatique - poids lourds d'un côté, et camionnettes - font que nous ne voyons pas comment nous pourrions recharger ces sites structurellement à moyen et long terme.
Et c'est une dégradation lente aussi de la compétitivité de l'Europe qui nous empêche de pouvoir exporter à partir de l'Europe. Il y a eu une forte dégradation depuis cinq ans de la compétitivité de l'Europe dont malheureusement ces sites subissent les conséquences.
Maintenant, les camionnettes modernes de plus en plus réclament des pneus beaucoup plus gros que ce que le site de Cholet est capable de fabriquer.
C'est là où nous sommes dans une impasse. Le site de Cholet est 40% plus cher que la moyenne des sites européens proches."
AFP : Est-ce que vous sentez que vous êtes pris dans une crise plus large de l'industrie européenne ?
FL : Si je compare nos coûts de production, uniquement nos coûts (...), en 2019, sur une base 100 de nos coûts de production en Asie, on était à peu près à 130 : 30% plus cher en Europe et 35% plus cher dans les Amériques.
Aujourd'hui, nos coûts de production sont restés à 100 en 2024 en Asie. Ils sont maintenant de 195 exactement en Europe. On est quasiment deux fois plus cher maintenant en Europe que nous-mêmes en Asie et on est à parité maintenant avec les Amériques.
Il y a deux phénomènes majeurs. Vous avez eu l'inflation cumulée dans tous nos achats sur les sites européens, plus la masse salariale et plus l'énergie.
En Europe, en électricité, on est deux fois plus cher aujourd'hui qu'aux Etats-Unis, et en gaz, on est quatre fois plus cher. Et ça, c'est par rapport aux Etats-Unis. Et les Etats-Unis sont non compétitifs pour exporter. Donc, par rapport à l'Asie, on est vraiment complètement décalés."
AFP : Comment allez-vous accompagner les salariés ?
FL : "C'est l'effondrement de l'activité qui a provoqué cette situation et ce que je veux dire à tous ces salariés, c'est que nous ne laisserons personne au bord du chemin, nous allons nous occuper de chacun en ce moment de stress intense pour eux.
Notre premier engagement, c'est de nous occuper de chacun, directement impacté par ces mesures de restructuration, et d'aider chaque personne à retrouver un futur professionnel stable.
Deuxième engagement, c'est de recréer au moins autant d'emplois qu'on en aura supprimé sur le territoire."
AFP : Comment renouer le dialogue avec les syndicats ?
FL : "Nous avons un dialogue social très fourni et nourri avec les organisations syndicales ouvertes au dialogue et on ne peut pas dire que le dialogue social n'est pas là.
Au contraire, chez Michelin il y a énormément de co-construction avec les syndicats sur beaucoup de sujets et d'ailleurs, sur les sites concernés, nous allons travailler avec les syndicats ouverts au dialogue pour trouver la meilleure solution pour chacun des salariés."
AFP : Quel est l'avenir de Michelin en France ?
FL : La France reste un pays stratégique pour Michelin et nous continuons à y investir massivement. Nous avons investi en France 2,5 milliards d'euros au cours des dix dernières années et nous allons continuer d'investir dans les années qui viennent.
C'est un pays dans lequel nous avons un peu plus de 19.000 salariés, nous avons plus de 3.000 chercheurs, c'est le centre de notre Recherche et Développement mondial, c'est notre siège social mondial, mais c'est aussi en France où nous investissons sur les activités d'avenir du groupe."