13/06/2024 - #Bmw
Voitures chinoises : l'Allemagne craint une guerre commerciale avec Pékin
Par AFP
(AFP) - L'Allemagne espère encore un compromis avec Pékin sur la question délicate des tarifs douaniers européens pour les voitures électriques chinoises afin d'éviter des représailles commerciales qui donnent des sueurs froides à sa puissante industrie automobile.
Le gouvernement d'Olaf Scholz joue les équilibristes pour ne pas se désolidariser de la Commission européenne qui propose de nouvelles taxes douanières, tout en défendant ses intérêts économiques.
"Il serait très souhaitable de parvenir à une solution consensuelle, car nous n'avons pas besoin d'obstacles supplémentaires au commerce, mais de faciliter le commerce mondial", a déclaré mercredi Steffen Hebestreit, porte-parole du gouvernement.
Il réagissait au projet de Bruxelles d'imposer des taxes supplémentaires sur les importations de véhicules électriques chinois dans l'UE. Les Européens reprochent à Pékin de doper illégalement ses constructeurs sur ce marché d'avenir et de fausser la concurrence.
Les droits de douane, actuellement de 10%, pourraient atteindre en moyenne 31% du prix de vente des véhicules importés en Europe, à partir du 4 juillet.
"Ce qui est important maintenant, c'est que la Commission parle avec la Chine à ce sujet", a plaidé une porte-parole du ministère allemand de l'Economie. Le ministre de l'Economie, Robert Habeck, devrait se rendre très prochainement en Chine, selon plusieurs médias.
Pays exportateur
Puissance exportatrice, la première économie de la zone euro craint des représailles de Pékin qui limiterait son accès au marché chinois.
Ces taxes "frappent les entreprises allemandes et leurs produits d'excellence", a déploré mercredi le ministre des Transports allemand, Volker Wissing.
Les constructeurs allemands rivalisent de mises en garde : Volkswagen, premier groupe automobile européen, craint "une dynamique fatale de mesures et de contre-mesures".
Les barrières commerciales ne sont "pas ce dont nous avons besoin, en tant que pays exportateur", a commenté le PDG de Mercedes, Ola Källenius, un point de vue partagé par la fédération allemande des constructeurs automobiles (VDA).
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait ouvert en septembre une enquête sur les subventions du gouvernement chinois au secteur des voitures électriques.
La France et l'Espagne ont poussé pour des mesures ciblées et proportionnées, alors que l'Allemagne a bataillé avec la Suède et la Hongrie pour éviter des sanctions trop dures.
Pour les allemands Volkswagen, BMW et Mercedes, la Chine est le principal marché national, représentant jusqu'à 36% des ventes en volume.
"Les effets négatifs de cette décision l'emportent sur les avantages potentiels pour l'industrie automobile européenne et en particulier allemande", a ajouté Volkswagen.
Transition climatique plus onéreuse ?
La fédération des constructeurs automobiles allemande a souligné l'importance de la Chine, et de ses véhicules électriques, pour "résoudre les problèmes mondiaux" comme la crise climatique.
Car les ventes de voitures électriques en Europe dépendent encore des importations de voitures en provenance de Chine, moins chères.
D'après les calculs de l'institut CAR, basé à Bochum, les voitures électriques importées de Chine en mai dernier se vendaient en Allemagne à 37.800 euros en moyenne, contre 44.400 euros pour les voitures non importées de Chine.
Une augmentation des droits de douanes pourrait entraîner une baisse de 25% des ventes de voitures électriques chinoises, rendant la transformation climatique "plus coûteuse", d'après l'institut d'économie Kiel, basé en Allemagne.
Berlin a pour objectif de voir circuler 15 millions de voitures électriques sur les routes allemandes d'ici 2030, un objectif qui semble de moins en moins réaliste.
Depuis plusieurs mois, les immatriculations de voitures électriques s'effondrent dans le pays en réaction à l'arrêt des aides publiques à l'achat.
Pour autant, les intérêts des grands constructeurs automobiles ne reflètent pas forcément la position du monde économique allemand : dans une récente enquête de l'Institut économique allemand (IW), publiée dans le quotidien Handelsblatt, plus de 80% des entreprises interrogées considéraient les droits de douane sur les voitures électriques chinoises comme "justifiés" ou "partiellement justifiés", au regard des pratiques commerciales de Pékin.