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11/09/2020 - #Man

Jean Achard et Grégory Tinon, Financo : "Les réseaux ont privilégié les établissements financiers indépendants au détriment des captives"

Par Florence Lagarde
Directrice de la rédaction et Directrice de la publication

Jean Achard et Grégory Tinon, Financo : "Les réseaux ont privilégié les établissements financiers indépendants au détriment des captives"
Grégory Tinon et Jean Achard

Depuis la fin du confinement, Financo enregistre des niveaux de production financière record avec un mois de juin sur un trend annuel à 1,1 milliard d’euros. Juillet et août ont également été des mois très forts. Jean Achard et Grégory Tinon nous expliquent comment Financo a géré ces derniers mois et nous précisent leur position sur le partage de la valeur entre les réseaux et les établissements financiers.

Depuis l’intégration de My Money Bank (ex-GE Money Bank) dans Financo, Jean Achard et Grégory Tinon se partagent les responsabilités de la direction commerciale de la division auto, moto et loisirs (AML) de Financo. Les quatre directions régionales (Paris, Aix, Bordeaux et Nantes), les commerciaux “front office” et “back office” sont rattachés à Jean Achard tandis que Grégory Tinon a la responsabilité de la politique tarifaire, de la stratégie produit et des coûts d’acquisition. Ils ont répondu ensemble à notre interview.

Autoactu.com : Un an après l’intégration de My Money Bank (ex-GE Money Bank) dans Financo, est-ce qu’au final la nouvelle entité est l’addition des deux ?
Jean Achard :
Nous avons même fait mieux que l’addition des deux. En 2019, nous avons atteint 750 millions d’euros de production financière, soit une croissance de plus de 80 millions d’euros, en tenant compte des partenaires perdus, des conquêtes et des saturations.
Nous avons augmenté notre activité avec les partenaires venus de MMB grâce à une offre de Financo plus large, notamment sur les produits d’assurance. Pour les ex-MMB il y a eu beaucoup d’avantages : outils, digitalisation, parcours électronique, signature électronique.
Grégory Tinon : L’intégration de MMB s’est traduite par l’arrivée de 800 partenaires, dont 50 en doublon, et nous en avons sélectionné 90%.

Autoactu.com : D’un point de vue opérationnel, la fusion est une période qui est définitivement derrière vous ?
Jean Achard :
Nous avons eu un gros chantier de préparation en 2018. MMB a intégré Financo au 1er juin 2018, nous avons appris à nous connaître pendant 6 mois et au 1er janvier 2019 nous avons fusionné les organisations avec une seule ligne hiérarchique pour les activités AML (auto, moto et loisirs).
En amont, il y a eu chez Financo un travail formidable et le basculement s’est fait sans couac. Cela n’a l’air de rien mais le travail fait par les équipes IT a été titanesque et au jour J à 8h du matin le 1er juin 2018 ça marchait !
Grégory Tinon : Cette fusion a permis de rationaliser l’activité des commerciaux : ils sont plus présents sur des secteurs plus compacts. Nous avons aussi eu un mariage intéressant entre la culture premium et LOA de MMB avec beaucoup de dossiers professionnels et la culture Financo très forte sur la vente de prestations annexes. Le vrai gage de notre réussite, c’est la fidélisation des collaborateurs : nous avons conservé l’ensemble des effectifs en 2019.

Autoactu.com : Cette fusion s’est-elle traduite par une amélioration de votre productivité ?
Jean Achard :
La productivité chez MMB s’était dégradée ces dernières années avec une activité passée de 600 millions d’euros pour la France et 600 millions d’euros pour les Dom à 600 millions d’euros pour les deux.
La fusion des activités MMB et Financo nous a permis d’optimiser nos coûts en passant tous les commerciaux sur nos trois métiers auto, moto et loisirs. Les ex-MMB ont appris la moto. Nous faisons aujourd’hui 750 millions d’euros avec 50 commerciaux, ce qui fait 15 millions d’euros par tête alors que chez MMB nous étions plutôt à 8.

Autoactu.com : Comment avait démarré l’année 2020 avant que tout s’arrête en mars ?
Jean Achard :
Nous étions partis pour faire un record avec 22 millions d’euros d’avance par rapport au plan qui était un plan de stabilité compte tenu de la forte croissance de 2019. De mi-avril à fin mai, nous avons fait 90% de dossiers en moins.

Autoactu.com : Comment s’est passée la reprise ? CGI Finance, Cetelem ont annoncé une forte croissance de leur activité après le déconfinement, est-ce que cela a été le cas également chez Financo ?
Jean Achard :
Nous avons fait un score historique avec une véritable frénésie d’achat en moto, loisirs et auto. Sur le mois de juin nous avons eu des transmissions de dossiers pour 180 millions, nous en avons accepté 140 millions et payé 95 millions. Cela représente un trend à 1,1 milliard sur 12 mois. C’est colossal. C’est d’autant plus impressionnant que nous avons fait ce mois de juin historique avec les mêmes équipes à 100% en télétravail.

Autoactu.com : Quelle organisation avez-vous mis en place pour tenir cette charge ?
Grégory Tinon :
Nous avons pu le faire grâce au soutien des commerciaux qui ont pris le téléphone pour permettre aux équipes des agences en charge de l’acceptation de se concentrer sur l’examen des dossiers. Cela a permis de filtrer, ce qui était urgent de ce qui ne l’était pas.
Jean Achard : Pour être plus rapide dans le traitement des dossiers nous avons cassé la notion de la propriété d’un client qui d’ordinaire appartient à une région et nous avons mis les flux dans un pot commun avec des rotations d’équipes. Nous avons décidé qu’une réponse en 4 heures « n’importe où » était préférable à une réponse en 4 jours avec les interlocuteurs habituels. Dans cette « virtualisation » nous avons travaillé l’entraide. Nous sommes passés à un niveau d’entraide proche de 40% avec 4 dossiers sur 10 dans le pot commun.

Autoactu.com : Comment expliquez-vous cette forte croissance d’activité en juin que l’on ne retrouve pas dans les immatriculations qui n’ont progressé que de 1,25% ?
Grégory Tinon :
D’une manière générale les réseaux ont privilégié les établissements financiers indépendants au détriment des captives dont certaines ont eu des délais de réponse qui pouvaient atteindre 15 jours. Pour un concessionnaire qui doit valider ses commandes ce n’était pas acceptable. Nous nous étions fixé l’objectif de ne pas dépasser 3 jours et nous l’avons tenu grâce aux commerciaux qui ont répondu aux points de vente à la place des agences.

Autoactu.com : Quelles ont été les conséquences techniques de cette situation exceptionnelle ?
Jean Achard :
Nous avons beaucoup travaillé à l’amélioration du workflow, la ligne de vie des contrats. Nous avons amélioré la lutte anti-fraude, le téléchargement des pièces, la pré-saisie des dossiers. Nous avons développé chez Financo des technologies assez poussées. Notre ambition est d’être reconnu parmi les meilleurs en termes de parcours et de qualité de service. Un bon back-office, c’est ce qui permet aux commerciaux de se concentrer sur leur job et de bien faire leur métier.
Dans la catastrophe du Covid, nous avons fait en 3 mois des développements sur le back-office qui auraient pris 12 à 18 mois en temps normal.

Autoactu.com : La signature électronique est-elle un sujet important en termes de concurrence entre les établissements financiers ?
Jean Achard :
La signature électronique était très développée chez Financo en moto où elle est utilisée dans sept dossiers sur dix. Nous avons eu un beau parcours sur l’auto et le loisir avec un dossier sur deux alors que la signature électronique n’est disponible que pour les financements aux particuliers ; pour des montants inférieurs à 75.000 euros.
Grégory Tinon : En tant qu’établissement financier indépendant nous sommes obligés d’être en avance sur les outils. Il y a encore des captives qui ne le font pas. Je pense que nous avons l’une des meilleures signatures électroniques des indépendants. Nous développons notre offre digitale par brique et nous préparons un parcours digital pour les professionnels que nous espérons lancer en 2021.

Autoactu.com : Comment se sont passés les mois de juillet et août ? Et comment sera la fin de l’année ?
Jean Achard :
Nous sommes revenus à une organisation normale avec un mois de juillet hors norme à plus de 100 millions d'euros et un excellent mois d'août, bien supérieur à nos attentes alors qu’il s’agit traditionnellement d’un mois modeste. Nous payons les dossiers en général avec un décalage de 4 à 5 mois dans l’automobile et nous serons bien en septembre. Après on ne sait pas, c’est l’inconnu. Nous ne savons pas comment sera le quatrième trimestre. Je pense qu’on peut remercier le gouvernement pour les mesures prises pour le soutien des salariés et des entreprises, même si nous sommes un pays qui a l’habitude de se plaindre.
Grégory Tinon : En moto, le sujet risque d’être une pénurie de produits au dernier trimestre. En automobile, nous allons être très dépendants des constructeurs. Pour certains, comme les marques asiatiques par exemple, il n’y aura pas de difficulté. Pour d’autres nous aurons des délais jusqu’en décembre/janvier.
Il faut aussi souligner que nous faisons ce niveau de production sans brader. Nous n’avons pas fait d’échéance gratuite mais proposé un report de 3 mois et cela a été bien accepté. Sur l’aspect tarifaire le taux de l’usure ne laisse plus de marge de manœuvre. Nous avons gardé un bon niveau de performance sur les assurances ce qui est très important chez nous pour notre rentabilité. Nous avons rentré une production saine avec beaucoup plus de particuliers que de professionnels.

Autoactu.com : Que restera-t-il de cette période inédite ?
Jean Achard :
Il restera de cette période une très grande solidarité. Financo est une entreprise bienveillante et humaine. Elle était donc prédisposée à ce que les équipes se serrent les coudes et s’entraident. C’est la force de Financo. J’y suis depuis 2 ans et j’adore cette entreprise. Financo est une entreprise tournée vers l’avenir et ouverte à toutes les propositions, nous avons fait des tests et en fonction des résultats nous avons retenu ou pas les projets.
Les entreprises qui étaient fragiles financièrement avant le confinement auront une fragilité accrue surtout s’il y a un retournement au quatrième trimestre. Même au sein des sociétés financières, il se peut que certaines captives soient des opportunités.

Autoactu.com : Vous évoquez une stratégie de reprise d’activité de captives ?
Jean Achard :
Nous n’évoquons rien. Nous regardons ce qu’il se passe.
La reprise de MMB par Financo est une success story. Elle nous a fait passer un cap en termes de taille mais nous ne ferons pas de course au volume au détriment de notre rentabilité.
Nous avons la chance d’avoir le Groupe Arkéa comme actionnaire solide ce qui nous permet de travailler sereinement.
Nous avons démontré que nous pouvions être rentables sur nos accords de marque en moto et en loisirs. Dans l’automobile, il s’agit de deals plus importants, s’il y a des opportunités nous regarderons et nous ne serons pas les seuls. Si un accord de marque devait dégrader notre ROE nous ne le ferions pas.

Autoactu.com : Il y a un peu plus d’un an, Cetelem a annoncé une nouvelle orientation stratégique privilégiant une redéfinition du partage équitable de la valeur entre les distributeurs et les établissements financiers. Est-ce que vous êtes également sur cette position ?
Jean Achard :
Le partage de la valeur entre les concessionnaires et nous, ce n’est pas 50/50. Dans certains cas il y a eu des deals à 98/2, on ne peut plus avoir ces positions.
Au sein du groupe Arkéa nous sommes reconnus comme une filiale importante. L’activité AML (auto-moto-loisir) représente 70% de l’activité de Financo.
Nous devons nous renforcer et améliorer notre profitabilité avec le soutien de la direction des risques, de la direction administrative et financière et de la direction de la conformité.
Grégory Tinon : Nous ne sommes pas encore à l’objectif de rentabilité pour l’activité auto mais nous sommes dans la bonne direction. Cela se fera par des deals qui seront rentables.
En 2019 nous avons refusé de nous positionner sur des appels d’offres de plusieurs groupes du Top 20 parce que le cahier des charges n’était pas viable dans nos objectifs. A nous de convaincre de nos atouts des partenaires qui acceptent un discours de transparence.

Autoactu.com : Comment expliquez-vous que ce discours de transparence soit compliqué à porter pour un établissement financier ?
Jean Achard :
Le partage de la valeur entre les établissements financiers et les distributeurs était tabou parce qu’il fallait faire croire que les maisons de financement étaient toujours riches. Encore aujourd’hui, certains distributeurs pensent que les moyens sont illimités. Or, ce n’est clairement plus le cas avec la division par deux du taux de l'usure, l’augmentation de la fraude et des rémunérations.
Nous n’avons jamais été autant sollicités par des groupes mais nous ne ferons pas de deals qui ne seraient pas rentables. Rien n’est acquis mais aujourd’hui nous sommes rassurés sur notre volumétrie.

Autoactu.com : Quelle est la typologie des groupes qui vous intéressent ? Vous préférez les groupes de taille intermédiaire ?
Gregory Tinon :
Nous avons toujours regardé dans le détail la rentabilité de chaque apporteur. Le sujet n’est pas tant le taux de commission que la qualité de la production avec des indicateurs sur le mix crédit/LOA, la part des assurances, le niveau de risque, le taux de renouvellement.
Nous avons des charges fixes au dossier et la volumétrie n’est pas le seul critère. C’est le montant moyen qui drive la rentabilité.
Tous les établissements financiers doivent avoir le même calcul.

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Réactions

Petite remarque en passant et au sujet des articles payants ou pas; j'ai bien peur qu'une hiérarchie perverse s'installe maintenant ici entre les sociétés ou les hommes qui apparaitront dans les articles payants, donc importants, et les autres relégués dans les gratuits…
J'attend de voir le prochain article sur Carlos...
;0))

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