05/07/2022
Regards dans le rétroviseur sur cinquante ans de Sécurité routière
Par AFP
(AFP) - En cinquante ans de règlementations, de campagnes de prévention et de contestation, la Sécurité routière a vu le nombre de morts sur les routes de France divisé par six mais ne relâche pas ses efforts face aux nouvelles causes d'accident.
Pour fêter son demi-siècle, la délégation rattachée au ministère de l'Intérieur présente à Paris et dans plusieurs stations balnéaires dix voitures symboles des grandes mesures destinées à freiner l'hécatombe routière (limitations de vitesse, ceinture de sécurité ou alcool au volant).
L'exposition itinérante débute en 1972, à bord d'une Renault 5 orange dont l'autoradio crache une chanson de Michel Fugain. Cette année-là, plus de 18.000 personnes meurent sur les routes de l'Hexagone, un record.
"Cette année marque une prise de conscience", rappelle à l'AFP Marie Gautier-Melleray, la déléguée interministérielle à la Sécurité routière. "On comprend qu'il ne faut pas seulement prendre des mesures éparses et ponctuelles, mais mener une politique cohérente".
La sécurité routière s'installe alors au menu des grandes préoccupations de plusieurs ministères.
En cinq ans, le gouvernement impose la ceinture de sécurité à l'avant des voitures, les premières limitations de vitesse et le port du casque aux deux roues hors-agglomérations. Le nombre annuel des morts retombe entre 10 et 11.000.
Vingt ans plus tard, les véhicules sont bardés d'équipements obligatoires tels que les airbags ou le système de freinage ABS et conçu pour mieux résister aux chocs. Mais le nombre de décès sur les routes stagne.
Après sa réélection en 2002, Jacques Chirac fait de la sécurité routière une grande cause nationale et déploie, entre autres mesures, des batteries de radars dans tout le pays.
Ce nouveau tour de vis suscite aussitôt des critiques. Les usagers de la route s'interrogent sur son efficacité et, surtout, dénoncent son côté liberticide : le mythe de l'automobile outil de liberté en prend un coup.
La vitesse maximale réduite à 80 km/h sur les routes nationales, acté en 2018, symbolise ces tensions.
Acceptabilité
Pour l'association 40 millions d'automobilistes, ce changement marque une "rupture dans l'acceptation de la sécurité routière", décrit son secrétaire général, Pierre Chasseray.
L'exposition de la Sécurité routière rappelle en retour que les vagues de mesures ont toutes eu un impact sur la courbe des décès et sur les comportements des usagers.
Dans une Citroën DS, la radio diffuse le témoignage, en 1973, d'un homme sauvé par sa ceinture de sécurité.
"Il faut une génération pour que l'acceptabilité d'une mesure soit totale", estime Anne Lavaud, la déléguée générale de la Prévention routière. "Il faut sans cesse rappeler les raisons de ces règles", rappelle-t-elle néanmoins.
Avec elle, les associations redoutent que la sécurité au volant recule dans la liste des préoccupations des Français et appellent à de nouvelles mesures.
"La Sécurité routière a du mal à mobiliser", regrette M. Chasseray, "elle est assimilée à la poses de radars et à du matraquage de sanctions", notamment en matière de vitesse ou d'usage du téléphone portable au volant.
Vice-président de la Ligue contre la violence routière, Jean-Yves Lamant estime lui que "l'acceptabilité des mesures est un faux sujet". Il déplore que les gouvernements "s'abritent derrière ça quand ils ne veulent pas prendre de mesures".
En 2019, la dernière année non affectée par la pandémie, la route a fait moins de 3.500 morts. Mais la déléguée à la Sécurité routière ne s'en contente pas. "Depuis 2022, on constate un relâchement dans le comportement des conducteurs, à tous les niveaux", relève Marie Gautier-Melleray.
Dans la dernière voiture de l'exposition, une Renault Captur de dernière génération, un flash info rappelle ainsi le besoin de lutter contre la conduite sous l'empire de stupéfiants, qui passe par l'augmentation des contrôles et la répression.
"L'objectif, comme fixé par l'ONU, est de diviser par deux le nombre de morts et de blessés graves en France", insiste la déléguée à la Sécurité routière.