14/09/2021 - #Renault , #Volkswagen Vp , #Tesla , #Dacia , #Rivian , #Smart , #Fiat , #Ford , #Seat
La voiture électrique ne doit laisser personne au bord de la route
Par Jean Patrick Teyssaire
Dans le cadre d'un partenariat avec l'événement #ELECTRICROAD 2021, nous publions une série de points de vue écrit par l'organisateur Jean-Patrick Teyssaire, Président d’Honneur de l’événement, qui décline ainsi les thèmes qui y seront abordés.
Lancée dans un développement accéléré sous l’invite très insistante du parlement européen, la mobilité électrique pourrait faire l’unanimité dans les couloirs dorés, mais pas encore auprès de la majorité des citoyens.
En juillet dernier une enquête Ipsos réalisée pour Vinci Autoroutes sur les attentes des Français en matière de mobilités indique que 20% du panel envisage d’acheter une voiture électrique (favorable) et 48 % y réfléchit (ballotage).
Reste les 32% : sans étiquette.
Selon toute vraisemblance, une pudeur statistique a voulu que Ipsos ne leur attribue pas une position qui pourrait être celle de l’opposition formelle. C’est pourtant bien l’avis que l’on rencontre parfois sur le terrain, que ce soit au café du commerce, dans le cercle familial ou même simplement en échangeant et avec les médias spécialisés sur l’automobile.
Certes le marché de l’électrique a triplé entre 2019 et 2020. Oui mais qui sont les acheteurs ? Toutes les études montrent que l’acheteur d’une voiture électrique est en majorité masculin, senior, urbain et CSP plus.
La demande pressante de décarbonation de la mobilité s’est accompagnée sur les tables à dessin de la nécessité absolue de maintenir le même niveau de confort et de performance que celui des voitures actuelles. Est-ce réaliste sans faire de la voiture électrique la voiture des riches ? L’ovni Tesla a ébloui les industriels, mais il ne reste qu’un mythe étincelant pour le citoyen lambda qui n’a que faire du "zéro à cent".
Le danger à éviter est que le véhicule électrique ne soit qu’un gadget luxueux ou la seconde voiture pour urbains aisés.
On connaît bien entendu tous les griefs qui sont faits à cette nouvelle mobilité, mais il se pourrait que dans l’esprit de l’acheteur moyen le principal soit le prix. Selon une étude de l’Observatoire Cetelem de l’automobile, le véhicule électrique est perçu comme une voiture plus chère à l'achat que son équivalent thermique pour 86% des automobilistes dans le monde et 91% des Français. Pour que l’électrique devienne la voiture de monsieur tout le monde, il faut rapidement orienter la communication des constructeurs sur l’idée que ce sera de moins en moins vrai. C’est déjà le cas en 2021 avec les citadines à moins de 20.000 € : Dacia Spring Electric, Renault Twingo Electric, Seat Mii Electric, Volkswagen e-Up, Fiat 500e, Smart Fortwo EQ. Encore plus fort : Citroën, en commercialisant avec succès son astucieuse AMI à 7.000 €, renoue avec le format quadricycle électrique (L7) qui a eu tant de mal à sortir de son image pétaradante et qui offre pourtant une solution de déplacements urbains particulièrement adaptée et accessible.
Il semble établi que la parité des prix entre les deux types de motorisation pourrait être atteint dès 2025 et 2027 en Europe grâce à deux facteurs : le développement des plateformes de production spécifiques pour les voitures électriques et la baisse des coûts des packs de batterie (Rapport Bloomberg NEF pour l’ONG Transport & Environment). La première condition semble en cours de réalisation, mais la seconde aura à compter avec la volonté de créer des chaînes de production de batteries 100 % européennes pour échapper à la domination asiatique. Les Européens sauront-ils faire baisser les coûts (passer de 137 dollars/kWh en 2020 à 58 dollars/kWh en 2030 comme annoncé) tout en démarrant une activité nouvelle de création de cellules alors que cette industrie est une "priorité stratégique" de la Chine depuis son programme gouvernemental baptisé “Made in China 2025” en 2015 ?
On connaît bien sûr les autres attentes (reproches) liées à la mobilité électrique : pour reprendre la même étude Ipsos/Vinci, 56% des sondés souhaitent des vitesses de charge plus rapides, 38% des tarifs de recharge plus avantageux, 31% plus de bornes de recharge sur les aires d’autoroute. En effet une certaine partie de la presse automobile se fait parfois l’écho de déboires liés aux voyages en véhicule électrique, sans doute à raison, et les anti-VE s’en repaissent. La nouvelle filière des bornes de recharge est pourtant une armée au combat qui grossit tous les jours. Densification, uniformisation des réseaux, standardisation des cartes de paiement, augmentation des puissances constituent le menu du jour pour tous ces acteurs, mais là aussi, un travail d’information populaire est nécessaire.
Enfin, pour que la mobilité électrique interpelle l’acheteur(se) réfractaire, le créneau de la berline de luxe ayant trouvé sa clientèle, il faudra que les constructeurs européens s’emploient à proposer des véhicules dans les créneaux manquants en prenant en considération notamment "l’homme – ou la femme- de la rue" ou de la campagne. Pourquoi les véhicules "simplifiés" tardent-ils à émerger ? Pourquoi les petits véhicules légers de livraison manquent-t-il à tous les catalogues ? Pourquoi les utilitaires 4X4 qui arrivent sur le marché sont-ils exclusivement américains – et chers - (Rivian, Bollinger, Ford, Tesla) ?
Si on veut accéder au marché de masse, dans les mois et les années qui viennent, le travail conjoint des politiques et les industriels va consister à faire en sorte que la mobilité électrique, révolution vertueuse des pays civilisés, ne soit pas un marqueur social.
Jean Patrick Teyssaire, président ER21
Le mardi 19 octobre 16h15-17h30 : PLÉNIÈRE 7 : L'automobile propre contre le peuple ? La transition de la mobilité est-elle compréhensible et bénéfique pour tout le monde ? Questions essentielles sur la responsabilité, la soutenabilité et le devenir de la mobilité.
Le mercredi 20 octobre 09h00-10h30 : PLÉNIÈRE 8 : Le Covid n’a pas eu raison de la voiture électrique : a-t-elle enfin accédé au marché de masse ?
Le congrès Electric Road, qui se déroule chaque année depuis six ans, a pour ambition de réunir les meilleurs industriels et les meilleurs experts pour réfléchir et proposer des outils de décision sur l’ensemble des enjeux et des défis que représente la formidable mutation que nous imposent les dangers climatiques.