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03/03/2021

L’ampleur de la pénurie de puces nécessite une nouvelle réflexion de la part de l’industrie et des décideurs

Par Sigrid de Vries

L’ampleur de la pénurie de puces nécessite une nouvelle réflexion de la part de l’industrie et des décideurs
"Avec la diminution rapide de l’activité et de l’emploi dans la technologie des moteurs à combustion, l’expansion vers le numérique offre d’importantes opportunités pour les équipementiers", souligne Sigrid de Vries, secrétaire générale du Clepa.

Sigrid de Vries, secrétaire générale du Clepa, l'association européenne des équipementiers automobiles, inaugure notre nouvelle rubrique Opinion. Elle analyse les causes de la pénurie de puces électroniques et évoque la stratégie européenne en matière de semi-conducteurs qui doit se faire en étroite collaboration avec l'industrie l’automobile, estime-t-elle.

L’ampleur même de la pénurie de semi-conducteurs et la complexité de résoudre des problèmes à la fois à court et à long terme exigent que l’industrie et les décideurs repensent les options de la chaîne d’approvisionnement. Elle indique également que 2021 pourrait bien devenir une année de grande volatilité pour les industries manufacturières. 

La pénurie actuelle de semi-conducteurs dans l’industrie automobile est due à de nombreux facteurs : la crise du COVID-19, l’imprévisibilité de la reprise, l’augmentation de la demande automobile de puces due à la conduite assistée et à l’électrification, en passant par la demande concurrente dans d’autres secteurs.

Lors de la première vague de la pandémie, l’industrie automobile s’est presque totalement immobilisée et a dû réduire drastiquement ses volumes de production pour réduire les coûts. Lorsque la demande s’est ensuite brusquement redressée, beaucoup se méfiaient encore de la solidité de la tendance. Or, la chaîne d’approvisionnement pour les puces est généralement longue, ce qui ajoute à la complexité : de nombreux acteurs doivent aligner et synchroniser la demande et l’offre. 

Une volatilité accrue de la demande automobile peut avoir des effets sur l’approvisionnement d’autres matières essentielles

En janvier 2021, le secteur s’est vu confronté à un écart important entre les véhicules commandés et la production, entre la demande, supérieure aux prévisions, et des stocks beaucoup plus faibles que d’habitude. En outre, la demande de véhicules électriques a commencé à s’envoler, accentuant la demande de puces.

Les observateurs de l’industrie et des marchés s’attendent à ce que les perturbations durent jusqu’au second semestre de l’année, avec une grande variété de secteurs touchés. L’approvisionnement d’autres matériaux nécessaires à l’industrie automobile pourrait manquer.

Une volatilité persistante et marquée de la demande, due à l’incertitude entourant l’endiguement de la pandémie et à la difficulté de prévoir les comportements d’achat, pourrait perturber l’approvisionnement en ressources essentielles.

Toutefois, la tendance incontestable est que la demande automobile pour les semi-conducteurs va continuer à croître en raison de la part croissante des technologies de conduite automatisée et assistée pour assurer le confort et la sécurité des conducteurs, ainsi que de l’électrification des véhicules avec la gestion sophistiquée de la performance des batteries et d’autres composants électroniques. 

La demande automobile pour les semi-conducteurs va continuer à croître 

En moyenne, un véhicule contient déjà aujourd’hui une centaine de semi-conducteurs perfectionnés, ce qui représente une forte augmentation par rapport aux dix dernières années, mais le nombre de semi-conducteurs des véhicules électrifiés peut être jusqu’à trois fois plus élevé. Les experts estiment que l’électronique et les matériaux semi-conducteurs pourraient représenter jusqu’à 45% de la valeur d’une voiture d’ici 2030.  

Les équipementiers automobiles sont déjà très investis dans l’électronique automobile, couvrant un large éventail d’applications allant des systèmes de confort et d’info-divertissement embarqués aux dispositifs de sécurité active, en passant par la gestion des batteries et des groupes motopropulseurs. Avec la diminution rapide de l’activité et de l’emploi dans la technologie des moteurs à combustion, l’expansion vers le "numérique" offre d’importantes opportunités. 

Alors que l’écosystème européen des semi-conducteurs emploie actuellement 200.000 personnes, McKinsey a estimé en 2019 que, dans de bonnes conditions, l’industrie automobile pourrait à elle seule créer 400.000 emplois européens liés aux composants électroniques et logiciels pour les véhicules.

Actuellement, 1,7 million de personnes sont employées par les équipementiers automobiles en Europe, en plus des 1,2 million par les constructeurs automobiles.  

Toutefois, les investissements nécessaires (en R&D et restructuration) s’élèvent à des milliards d’euros pour un rendement et un développement de l’emploi qui n’interviendra qu’après plusieurs années. De ce point de vue, les événements relatifs aux semi-conducteurs ne soulignent pas seulement l’attention nécessaire à la diversification de la chaîne d’approvisionnement, elles soulèvent également des questions stratégiques pour l’Europe. 

Des questions auxquelles la Commission européenne tentera de répondre en partie dans le cadre de l’Alliance européenne pour la nanoélectronique qui sera lancé le mois prochain (l’équivalent de l’Airbus des batteries qui a été créée précédemment). Les gouvernements allemand et français cherchent également à accroître l’activité industrielle dans ce domaine, comme l’ont exprimé une déclaration conjointe cette semaine, notamment à travers l’instrument IPCEI (Important Project of Common European Interest), et plaident en faveur de l’utilisation des Fonds de relance européens.

L’accent doit être mis sur la R&D et la demande du marché, plutôt que sur les subventions et la relocalisation

La Commission européenne examinera à la fois les options industrielles et de R&D, et c’est la bonne approche. Ces deux aspects méritent un examen attentif. Les industries prospères ne résultent pas de subventions et d’interventionnisme en faveur de la relocalisation, mais reposent sur une demande du marché et une équation économique rentable.
Il sera aussi essentiel de mettre l’accent sur la R&D, de même que sur la disponibilité et le renforcement des compétences numériques dans l’ensemble de l’éducation et de l’emploi en Europe. 

Le principal défi consistera à assurer le développement et la production de puces en Europe, en partageant les technologies de base entre les acteurs, tout en laissant suffisamment d’espace pour la diversification, à une échelle permettant d’approvisionner de manière rentable un marché intérieur et des acteurs étrangers.
La Commission a, à juste titre, identifié l’automobile comme l’un des quatre secteurs sur lesquels se concentrer. L’automobile représente environ 10% de la demande mondiale de semi-conducteurs, mais 37% de la demande européenne : il n’y aura pas de stratégie européenne réussie en matière de semi-conducteurs sans que l’automobile joue un rôle clé. 

La stratégie européenne en matière de semi-conducteurs ne peut réussir sans un rôle clé pour l’automobile 

La future stratégie dans le domaine des puces semi-conducteurs est liée à la question plus vaste de savoir comment faire en sorte que l’industrie européenne dans son ensemble saisissent les opportunités commerciales et d’emploi dans les domaines de l’électronique, des logiciels et de l’intelligence artificielle et assure sa compétitivité future. Dans cette perspective, la stratégie de la décennie numérique de la Commission et le réexamen de la politique industrielle de l’UE devront également être soigneusement calibrés. Les nombreuses stratégies et initiatives doivent être cohérentes et se renforcer mutuellement.  

Une stratégie industrielle réussie devra s’appuyer sur le long terme en soutenant les investissements en R&D, en fixant des normes et en renforçant le rôle de l’Europe dans la recherche et les compétences en intelligence artificielle et l’attrait qu’elle exerce sur les talents internationaux. Le secteur automobile a le potentiel de servir de tête de pont essentielle pour l’ensemble de la base industrielle européenne afin de saisir les opportunités d’une économie de plus en plus numérique. 

Notre rubrique Opinion vous donne la parole. Si vous souhaitez vous exprimer sur l'industrie, le commerce automobile, le digital ou tout autre sujet susceptible d'intéresser nos lecteurs, contactez nous !

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Réactions

Combien l’électrification va t’elle faire disparaître d’emplois?,en plus de l’abandon de notre indépendance,cette crise le démontre déjà combien nous devenons dépendants !
Les syndicats automobiles Allemands ont déjà tiré le signal d’alarme et menacé de grèves devant le mur de licenciements.
Les 400000 emplois créés d’après cette opinion,ne sont que chimère,les suppressions elles hélas seront bien là,regardez les promesses d’embauche des énergies renouvelables tout à fait pschitt.
Ceci n’est que mon opinion de citoyen qui en a marre des Miliards engloutis dans cette transition fantoche.
Combien de pièces en moins entre un VE et une fumante?enorme

Cher Alain, vous parlez d'abandon de notre indépendance.
Vous faites allusion à nos formidables réserves pétrolières j'imagine.
Les composants électroniques (puces et autres) ne sont pas utilisés seulement dans les VE, mais dans toutes les bagnoles.
La troisième puissance économique et industrielle mondiale n'a jamais eu de ressources naturelles, existe sur une surface territoriale sans matières premières, ridiculement petite en grande partie inhabitable, sujette à de nombreux tremblements de terre et de raz-de-marée, mais cette puissance industrielle fournit moult produits d'une immense ingéniosité et d'une fiabilité remarquable. (Sony, Nikon, Canon, Nissan, Toyota, Honda, NEC, robotique, médical, optique, etc.)
Ce pays est dépendant de tout !

Merci Mme de Vries pour votre analyse et votre article très intéressant.
La demande en semi-conducteurs va certainement exploser dans les prochains années comme vous l'avez évoqué, pour les applications d'intelligence artificielle.
Mais également dans des produits inattendus qui vont se retrouver connectés, comme par exemple l'électroménager.
On pourra à distance mettre en route son chauffage, son lave-vaisselle, sa machine à laver, voir ce qui reste dans le réfrigérateur pour anticiper les courses etc
C'est aussi l'intérêt de la 5G.
Je laisse à chacun sa propre opinion sur les nécessités absolues d'avoir tout cela à sa disposition...

Le fait de pouvoir mettre en route mes radiateurs à Duingt, depuis mon smartphone, en réglant au demi degré près la température dans chaque pièce m'a changé la vie !
Je choisi aussi à distance la quantité d'eau chaude souhaitée ; une sacrée avancée. Plus besoin de demander au frère, au voisin d'aller "mettre le chauffage en route".
Idem, quand je repars et que j'ai oublié d'éteindre, un petit coup sur le smartphone et remise des radiateurs à 12°C et le chauffe-eau en veille.
Toutes les batteries branchées avec les chargeurs qui maintiennent la charge, et le tour est joué.

Soyons prudents car a vouloir tout connecter par principe à tout-va, on ne sait plus vraiment pourquoi et cela devient n'importe quoi.
La dernière à ce sujet dans la bagnole est de faire une notification sur le smartphone d'un client pour lui indiquer qu'il y a un voyant d'allumé sur la voiture qu'il conduit...
Remarquez quand toutes les bielles auront tapé dans le capot, le client ne pourra pas dire qu'il ne l'a pas vu à cause du soleil qui arrivait juste de 35° tribord et qu'étant fan d'AC/DC il n'a pas entendu les bling-blong de l'ordinateur de bord !
;0)
PS : Bruno, et le plaisir d'arriver dans une maison de campagne froide et de faire un feu dans la cheminée et de démarrer la vieille cuisinière et de sortir le paté/saucisson/jambon de pays/cornichons/rouge* qui flingue à déguster avec la doudoune sans manche en entendant crépiter le bois de châtaignier et de se dire, "on est pas bien là" ?
;0))
* pour le Cap Ferret remplacer par bourriche/bulots/crevettes/Lillet et accessoirement Blanc du Nil et Pantalon en toile fuschia pour les Parisiens.

Oui Lucos, la maison glacée et le feu dans la cheminée, j'ai beaucoup donné.
Et il y a 60 ans, ça gelait à pierre fendre tous les hivers, brrrrrrrr.
Je conduisais ma Deuche avec des gants et un bonnet, malgré le voile (non-islamic) fixé sur la calandre avec ses petits élastiques.

Et sur cette voiture à l'époque pas besoin de puces et d'être connecté pour savoir ce qu'il se passait, quand le chauffage à air de refroidissement marchait et que ça ne sentait plus l'huile, fallait vite en remettre !
(Avant que les bielles tapent dans les pneus..)
;0))

Les seules puces présentes à l'époque auraient pu être sur la banquette arrière, dans les poils du chien...
Et en plus si le conducteur était bourré de tics...
;-)

Dommage que je ne puisse pas mettre sur le forum Autoactu la photo de la porte arrière droite d'une Deuche avec les mentions suivantes :
No ABS
No Airbags
No Electronic Injection
No Brake assist
No Power steering
No Air Condionner
No Electric Windows
No Central Locking
No Stop & Start
No Stabilizer Bars
No Stereo
No GPS
..........
.........
.........
No Problems

J'avais bien aimé.

J'ajouterais :
No driver,
no risks !
;-)

Apparemment Clerion semble très adepte de la voiture autonome (?)

… Sinon quelque peu étrange la présence de la mention "No Stabilizer" Bars dans la longue liste discriminante de la deuche …
Ok pour un usage "domestique" de la deuche, les barres stabilisatrices sont contre productives …
Pour ceux qui ont "swapés" (y en a !) leur parapluie sur 4 roues" c'est sans doute assez différent …
Pour la plupart du reste de la production automobile, la présence de barres stab a une influence clairement positive sur le précision du comportement routier du véhicule … Et çà n'est pas un mâchin electrique, electromécanique ou électronique à l'inverse des autres équipements cités … Un intrus en somme ?
;0)

Du micro au macro ?
... Il a un aspect non abordé concernant cette pénurie de semi conducteurs ... C'est la tendance inflationniste concernant les prix des véhicules ... Ce qui rare est cher est un vieux dogme qui a fait ses preuves ... !
L'on parle ces temps ci du retour de l'inflation et de son influence négative sur la modicité des taux d'intérêt (aie, aie,aie, la dette !), notamment au regard du renchérissement du prix des matières premières ... Le sujet de la pénurie des semi conducteurs contribue à cette tendance ...
;0)

ADE,
les barres stab des Deuches c'était quand les roues AV frottaient dans les ailes... et la précision de conduite de l'engin tenait de la rigidité du loukoum.
;0)

Des barres stabilisatrices sur les 2cv ?
Je pars de l'idée que le "parapluie sur 4 roues" n'en dispose pas de série...Me trompe je ?
Certains "forcenés" ont pu monter celle de l'Ami 8, mais c'est tout ...
Quant aux ceusses qui ont inscrit leur deuche "swappée" dans des courses de côte, c'est encore une autre histoire ... J'en ai vu évoluer et çà n'avait rien du loukoum de série !
D'autres ont bien monté des moteurs de R5 Turbo dans des 4L ou des moteurs de Habayusa dans des Mini ou Fiat 500 ... Qu'importe le flacon ...On est loin de la pénurie
;0)

R5 turbo dans une 4 L ça passe pas,mais mon pote avait installé un R 5 Alpine dans une F6 et le compteur n’était gradué que jusqu’à 140/50,l’aiguille n’ayant pas de butée on roulait 20/30 km/h dans les descentes......
Le problème c’est que passé 150 les portes avait tendances à s’entrebâiller par le haut et c’était des glaces coulissantes.
Le record me fut donné de voir dans l’équipe d’assistance Chrysler époque M Chemin avec l’hemicuda et où les mécanos avait greffé un bousin de Cuda dans le Van d’assistance deFiorentino....va va vroum))))la conso,Barbarella en mangerait son marocain))

Puisque vous parlez du temps jadis ...Alain ...la 4L du Dakar des frères Marreau n'embarquait elle pas elle aussi un moteur de 5 Alpine ... ?
,0)

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