11/07/2022
Elon Musk, entrepreneur baroque, visionnaire et insaisissable
Par AFP
(AFP) - Elon Musk ne veut finalement pas gouverner la place publique : l'extravagant entrepreneur, qui cherche déjà à sauver l'humanité avec des voitures électriques, des fusées, des tunnels et des implants cérébraux, a renoncé à racheter Twitter.
Né en Afrique du Sud, citoyen américain et canadien, dirigeant de SpaceX et Tesla, l'homme le plus riche du monde est devenu une figure centrale du néo-capitalisme américain avec ses ambitions extra-planétaires et ses idéaux politiques, qu'il partage avec ses 100 millions d'abonnés sur Twitter.
Mais ce réseau social qu'il adore critiquer ne devrait finalement pas tomber dans son escarcelle.
Début avril, il avait créé la surprise en annonçant détenir 9,2% du capital de l'oiseau bleu, avant de manifester son intention de le racheter pour en faire une plateforme plus libre, estimant que la modération des contenus y était trop stricte.
Mais après de nombreuses péripéties, menaces et insultes -- et même un émoji en forme de crotte tweeté à l'intention du patron du réseau -- le libertarien a mis fin vendredi à l'accord passé pour racheter Twitter pour 44 milliards de dollars.
A 51 ans, l'entrepreneur en série est déjà à la tête de Tesla, premier constructeur de véhicules électriques au monde, et de SpaceX, sa société spatiale qui doit aider la Nasa à envoyer des astronautes sur la Lune d'ici 2025.
Sa fortune est estimée par Forbes à environ 238 milliards de dollars.
Il l'a amassée principalement grâce à Tesla et s'en sert pour financer ses diverses aventures personnelles comme Neuralink, une start-up qui ambitionne de relier directement le cerveau humain à l'ordinateur, et The Boring Company, qui entend révolutionner les transports urbains avec des tunnels.
Quel que soit le secteur, il met en avant son désir de sauver l'humanité, l'environnement ou la démocratie. Interviewé sur ses raisons d'acquérir Twitter, il avait évoqué un "risque pour la civilisation" si les utilisateurs perdaient confiance en la plateforme.
"X Æ A-12"
Mégalomane, bourreau de travail, Elon Musk donne, au fil des tweets, un aperçu de sa personnalité, soucieux de son image de patron rebelle, amateur de joutes verbales et de provocations, anti-politiquement correct.
Le symbole de cette ligne insaisissable, qui plaît de plus en plus à certains républicains, aura été le déménagement de Tesla de Californie au Texas, pour exprimer son ras-le-bol vis-à-vis de la politique du gouverneur Gavin Newsom, jugée défavorable à l'innovation et l'entrepreneuriat.
"Son style libertarien a un peu de droite radicale en lui", estime Roger Kay, de Endpoint Technologies Associates. "Donc il y a beaucoup de gens avec qui ça ne passe pas."
Sur Twitter, il a récemment défié Vladimir Poutine en duel ou comparé le Premier ministre canadien Justin Trudeau à Adolf Hitler.
En 2018, il avait fumé du cannabis lors d'un entretien filmé, tout en évoquant la conquête spatiale, la fin du monde et la libido des singes bonobos.
En mai 2021, il a révélé être atteint du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme.
Divorcé trois fois, M. Musk est père de dix enfants, dont un décédé à 10 semaines. L'un d'entre eux, une fille transgenre, a récemment déposé une demande officielle pour changer de nom de famille en même temps que de genre afin de couper tout lien avec son père.
Et la presse américaine a récemment révélé qu'il avait eu des jumeaux en novembre avec une dirigeante de Neuralink, quelques semaines avant la naissance d'Exa Dark Sideræl Musk, qu'il a eue avec la chanteuse Grimes. C'est la petite soeur de "X Æ A-12", un garçon.
Il a depuis tweeté "faire de son mieux pour combattre la crise de sous-population", assurant que "l'effondrement du taux de natalité (était) de loin le plus grand danger auquel la civilisation est confrontée".
Le culte Tesla
L'homme clive, entre une armée de fans qui l'adulent et assurent sa publicité, et ceux qui le détestent. Mais il est difficile de nier le succès de Tesla.
Longtemps déficitaire, l'entreprise est désormais un immense succès industriel et financier, avec un profit record de 5,5 milliards de dollars en 2021 et une valorisation boursière immense.
"Je pense que j'en sais plus sur la production industrielle que n'importe qui au monde", s'est vanté Elon Musk récemment.
Ce n'était pas gagné. De 2017 à 2019, la société était "constamment au bord de la faillite", a-t-il expliqué.
"Rien n'allait pour la production du Model 3. (...) Je vivais dans l'usine de Fremont (Californie), je dormais par terre pour que l'équipe voie que je n'étais pas dans ma tour d'ivoire", a-t-il raconté.
Plusieurs plaintes pour harcèlement sexuel et discriminations ont été déposées contre la direction de cette usine, accusée de "ségrégation raciale" par la Californie.
"Civilisation spatiale"
Né à Pretoria, en Afrique du Sud, le 28 juin 1971 d'un père ingénieur et d'une Canadienne mannequin, Elon Musk fait ses études au Canada puis aux Etats-Unis.
A 24 ans, il crée, avec son frère Kimbal, Zip2, un éditeur de logiciels en ligne. Il devient millionnaire avant ses 30 ans en le revendant au fabricant d'ordinateurs Compaq en 1999 pour plus de 300 millions de dollars.
Le jeune entrepreneur fonde ensuite X.com, qui sera fusionnée avec PayPal, puis rachetée par eBay en 2002 pour 1,5 milliard.
Avec SpaceX, fondée dans la foulée, il a enchaîné les succès, la compagnie devenue cheville ouvrière des nouvelles ambitions de la Nasa.
"Le but global est de permettre à la vie de se développer sur plusieurs planètes et de faire de l'humanité une civilisation spatiale", avait affirmé M. Musk dans un entretien accordé à Time Magazine, qui l'a nommé fin 2021 personnalité de l'année.